Épanchement

Épanchement :

  1. (Vieilli) Action de verser le liquide contenu dans un flacon.
  2. Action de s’épancher ; communication libre et confiante des sentiments, des pensées intimes.

Lundi soir je me suis épanchée ; je sentais que ma coupe émotionnelle était pleine. J’aurais pu écrire dans un cahier mais j’ai préféré l’interface désormais familière de mon blog. Je ne savais pas si je publierais mes sentiments ou non et j’ai longtemps hésité. Je ne suis toujours pas sûre de faire le bon choix. A quoi bon un texte de plus ? Et si, par maladresse, il pouvait blesser, agacer ou mettre en colère ? Mais je me suis dit que certains épanchements que j’avais pu lire m’avaient fait du bien et m’avaient permis de me sentir moins seule. Donc voici mon état d’âme actuel, libre à vous de le lire et de vous épancher à votre tour dans les commentaires, si vous le souhaitez.

croquis-edward-hopper-01
Edward Hopper, peintre de la solitude, du silence et du repli sur soi

Ce que j’écris ici, je ne sais pas encore si je le partagerai. Mais je l’écris pour le poser, pour le transposer de mon for intérieur à cet écran. Car ce for intérieur, ce joyeux jardin, tend à se solidifier et à se transformer peu à peu en forteresse, pauvre château de sable. Depuis vendredi, je ressens un peu les mêmes émotions qu’après une brutale rupture amoureuse. J’ai l’impression de voir le monde différemment, d’avoir froid et de faire les premiers pas dans une vie qui ne sera plus tout à fait la même. L’expérience m’a appris qu’écrire permettait souvent de mettre un peu à distance ses émotions et de mieux les digérer. Et à défaut de changer la réalité et de revenir en arrière, de permettre de mieux vivre et d’y voir plus clair.

J’ai envie de pleurer et je pleure sans larme (enfin, pas toujours) depuis vendredi. Et pourtant, je fais partie des « chanceux », de ceux qui n’y étaient pas et qui n’ont perdu aucun proche.

Chez moi, à l’abattement, la sidération et la tristesse s’ajoute aussi l’angoisse. On me dit que c’est normal d’avoir peur. Mais j’entends et je lis aussi des « même pas peur ». Si je suis honnête avec moi même, je ne ressens pas vraiment ce « même pas peur ». La vérité c’est que je suis angoissée et je sens que cette angoisse, si je ne la regarde pas en face, va me dicter sournoisement mon comportement et me prendre en otage.

Je m’en rends compte entre autre en appréhendant les prochains spectacles que je dois faire. Je les appréhende et je me sens honteuse de cette appréhension, facilement assimilable à de la faiblesse, de la lâcheté, que sais-je. Moi-même je trouve ce sentiment nul et j’ai mille raisons à lui opposer. Mais je ne suis pas que raison et mes émotions, pour l’instant, sont un peu en liberté.

Je sais qu’il va me falloir lutter contre cela.

Ce week-end, je me suis dit : finalement, rien ne m’oblige à assurer ces spectacles, rien. Je les fais pour le plaisir, si ça doit être une source de mal être, je n’ai pas à y aller. C’est vrai. Mais au fond, rien ne m’oblige à rien et si tout doit finir par devenir une source de mal-être (sortir, se balader, manger en terrasse, aller à un concert), alors rien ne m’oblige à vivre. Je veux dire, autant arrêter là et évacuer directement l’objet de mon angoisse : la mort. Je pousse la logique à l’absurde : mourir au plus vite, voila une bonne chose de faite. Intenable n’est-ce pas ? C’est ce que je me dis aussi.

C’est pourquoi, je me dois, à moi-même avant tout, de continuer à vivre « normalement ». Et je le dois aussi aux autres. Car si même les « chanceux » se replient, alors autant tout arrêter tout de suite.

J’écoute France Musique et j’entends les artistes qui se sentent investis d’une mission. Ils souhaitent remonter au plus vite sur scène et propager la joie. Même si j’ai l’impression de n’avoir, personnellement, aucune joie à partager en ce moment, je comprends leur démarche et je me dis que, moi aussi je me dois d’en faire autant. Sinon, autant ne plus être artiste.

Même si je ne suis pas une rock star, même si je ne déchaine pas les foules, je pense qu’à mon niveau je peux amener des émotions positives au public et je dois entretenir et partager cette flamme.

Et puis, je sais bien que ces drames peuvent arriver à chacun de nous. Pas besoin d’être photographe de guerre. Cela peut paraitre complètement stupide, mais pour m’apaiser, je me dis que je m’en remets aux mains du destin. Ne venez pas me demander des développements philosophiques sur la destinée, la fatalité, etc. C’est plutôt une image mentale qui s’avère efficace dans mon cas. Alors advienne que pourra et vive l’huile essentielle de camomille !

Comme espéré, écrire ce texte m’a fait du bien, je me sens un peu mieux. Et puis à quoi sert ce Journal si ce n’est pas pour s’y confier un peu ?

 

Par ailleurs, voici un article qui m’a parlé à ce sujet : « Pourquoi il est important d’accepter d’avoir peur ».

 

Ce billet est publié dans Cher journal.

Dernière mise à jour :

3 commentaires

  1. Je ne sais plus si j’ai déjà commenté ici alors bonjour, et aussi, j’aime beaucoup te lire et découvrir ton univers à mille lieues du mien.

    Je suis contente que tu ais partagé ces réflexions. Ça fait du bien de lire qu’on n’est pas seul(e) à avoir peur, même si, tu sais, je me sens tellement coupable d’avoir peur, alors que j’habite un petit bled bien loin de Paris.

    Je crois que tu as raison, je crois que c’est ton rôle et aussi peut-être que ce sera ta thérapie, de partager de belles choses. De transmettre du positif, de l’artistique.

    J’essaie aussi de faire ça. Je me dis que je ne suis ni politicienne ni soldat (je n’ai jamais voulu l’être, ça ne m’a jamais effleuré l’esprit) mais j’ai quand même choisi de jouer un rôle dans la société. Pour moi, c’est écrire et enseigner. Pour toi, c’est danser. C’est peut-être une toute petite pierre à apporter, mais il en faut, des pierres, et à mon avis c’est mieux de construire un édifice que d’envoyer un boulet de canon pour démolir les autres.

    Alors oui, advienne que pourra. Merci pour ton billet !

    1. Merci Nathalie, ravie de lire ton premier commentaire. J’espère te croiser sous d’autres posts plus joyeux à l’avenir…
      Je découvre aussi ton blog et il parle à la fille de lettres qui sommeille en moi ;)

      Finalement, ce soir, après un week-end passé sur la scène de la Nouvelle Seine, j’ai repris des forces. J’étais aussi très touchée par l’attention du public vendredi soir, très particulière. Ils étaient peu nombreux, mais plus présents que jamais, et alors je savais que j’étais là où je devais être.

      1. C’est gentil d’être allée voir ce que je faisais !

        Ce que tu dis de ton passage sur scène ne m’étonne pas… Ça devait être très intense ! Bravo d’être remontée sur les planches ! J’ai presque envie de dire merci pour eux parce que ça me paraît vraiment important que tu l’ais fait :)

Répondre

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec le symbole « * ».